Ces portraits dits « historiés », dans lesquels l’effigie d’une personne vivante s’enrichit d’attributs mythologiques comme dans un tableau d’histoire, sont un genre pictural à part entière. D’abord prérogative masculine adoptée par les grands pour célébrer leurs vertus, il devient vers 1680 l’apanage des modèles féminins : le langage allégorique les pare de qualités à connotation spécifiquement féminine et galante, comme la beauté, la jeunesse, la grâce, qui, bien comprises, pouvaient aussi être un moyen de manier le pouvoir. Dès les années 1740, ces peintures font cependant l’objet de critiques répétées et le genre perd peu à peu sa légitimité à la fin de l’Ancien Régime, avant que ce procédé de distinction aristocratique suscite la méfiance des historiens de l’art, qui n’y verront que l’expression d’un amusement futile de milieux oisifs.
Le présent ouvrage remet à leur juste place ces travestissements : à la fois œuvre d’art, objet culturel et pratique sociale, le portrait historié est un phénomène de goût révélateur d’une culture de cour en pleine transformation. Marlen Schneider met ici en lumière les fonctions, les propriétés formelles, la réception et la portée historique d’un type de représentation trop longtemps déconsidéré.